Lettre 7 - La malle aux manuscrits
Juliette Drouet, Gardienne de l'Œuvre
Un Trésor en Péril : Les Manuscrits Menacés
Au lendemain du coup d'État du 2 décembre 1851, Victor Hugo n'est pas seulement un homme politique traqué, il est aussi un écrivain dont l'œuvre de toute une vie est en danger. En tant que l'un des principaux meneurs de la résistance à Paris, il sait que son domicile, rue de la Tour d'Auvergne, peut être perquisitionné à tout moment. La police de Bonaparte pourrait saisir, et potentiellement détruire, ses biens les plus précieux : non pas ses meubles ou son argent, mais les milliers de pages manuscrites qui représentent son passé et son avenir littéraire. Des romans en cours, des poèmes inédits, des pièces de théâtre, des notes... tout ce trésor de papier est menacé.
La Mission de Juliette Drouet : Un Acte de Confiance Absolue
Dans les heures critiques qui précèdent sa propre évasion, Hugo décide de rassembler l'essentiel de son œuvre et la place dans une grande malle de voyage. Cette malle contient notamment les manuscrits de ce qui deviendra Les Misérables et Les Contemplations.
Il confie alors ce trésor à la seule personne en qui il a une confiance absolue, celle qui a déjà prouvé sa bravoure et sa dévotion sans faille : Juliette Drouet. La mission est périlleuse. Il ne s'agit pas d'un simple déménagement.
L'Odyssée de la Malle et de sa Gardienne
Juliette Drouet accepte cette responsabilité. Plutôt que de confier la malle à un transporteur anonyme, elle décide d'accomplir elle-même la mission. Quelques jours après la fuite réussie de Hugo, elle prend à son tour le train pour la Belgique, voyageant personnellement avec le précieux et compromettant bagage.
Elle arrive saine et sauve à Bruxelles, rejoignant Hugo et lui remettant la malle intacte. Cet épisode, souvent éclipsé par le récit de la propre fuite de Hugo, est fondamental. Sans le courage, l'intelligence et la loyauté de Juliette Drouet, une part monumentale du patrimoine littéraire français aurait pu être perdue à jamais. En entreprenant elle-même ce voyage, elle n'est pas devenue une simple gardienne de bagages ; elle a été la gardienne de l'œuvre, celle qui a assuré la survie matérielle des chefs-d'œuvre qui, depuis l'exil, allaient devenir les plus puissantes armes de Hugo contre l'Empire.