Lettre 3 - Loi du 31 mai 1850
Dans votre troisième courrier, vous avez lu comment Victor Hugo, en juillet 1851, évoquait la loi du 31 mai 1850 comme une "mesure passée qui a affaibli la démocratie". Cette loi, votée par l'Assemblée, devint un enjeu majeur et un outil dans le jeu politique complexe de Louis-Napoléon Bonaparte.
L'essentiel à retenir
La loi du 31 mai 1850, bien que votée par une Assemblée législative à majorité conservatrice (le "parti de l'Ordre"), eut des conséquences dont Louis-Napoléon Bonaparte sut habilement tirer parti pour ses propres ambitions présidentielles.
- Ce que la loi a changé : Elle a considérablement restreint le suffrage universel masculin, notamment en exigeant trois années de résidence continue dans le même canton pour pouvoir voter.
- L'impact direct : Cette mesure a eu pour effet d'exclure près d'un tiers des électeurs, majoritairement des ouvriers et des artisans, plus mobiles.
- L'exploitation par Bonaparte : Bien qu'il n'en fût pas l'initiateur direct, Louis-Napoléon Bonaparte a laissé l'Assemblée porter la responsabilité de cette loi impopulaire. Par la suite, son calcul politique fut d'en exploiter l'impopularité pour discréditer cette même Assemblée et se présenter, notamment à l'approche de la question de sa réélection, comme le seul capable de restaurer le suffrage universel, espérant ainsi obtenir le soutien populaire nécessaire.
Pourquoi Hugo cite-t-il en juillet 1851 ?
Lorsque Victor Hugo prend la parole à l'Assemblée législative le 17 juillet 1851, le débat fait rage autour de la révision de la Constitution, cruciale pour les ambitions de Louis-Napoléon Bonaparte. Hugo cite la loi du 31 mai 1850 et l'utilise comme un avertissement puissant : la République a déjà été trahie une première fois sur un principe fondamental, la démocratie amputée par une majorité conservatrice. Évoquer cette loi, c'est souligner que les mêmes forces réactionnaires et les mêmes appétits de pouvoir sont à l'œuvre. C'est un appel à ne pas céder à nouveau en ouvrant la voie à un pouvoir personnel renforcé, celui de "Napoléon le Petit".
En conclusion : une loi, un symbole, un enjeu
La loi du 31 mai 1850 est bien plus qu'un texte juridique. Elle est un symbole des tensions profondes de la Seconde République et devint un outil politique majeur dans la stratégie de Louis-Napoléon Bonaparte. Pour Victor Hugo, elle représente une régression démocratique dont le souvenir doit aiguiser la vigilance des républicains. Comprendre cette loi et son instrumentalisation éclaire vivement les combats et les avertissements de l'écrivain durant cet été décisif de 1851.