
Lettre 7 - Articles de la presse belge
Les Journaux Belges
Bruxelles, l'Oreille de l'Europe
Lorsque Victor Hugo arrive à Bruxelles le 12 décembre 1851, il n’est plus au cœur des événements parisiens. Il a résisté, il a fui, et maintenant il a besoin de comprendre. Il se lance dans une reconstitution jour par jour, heure par heure, du "crime" qui vient d'avoir lieu à Paris. Pour écrire ce qui deviendra son pamphlet foudroyant, Napoléon le Petit, il va se transformer en journaliste d'investigation. Ses sources ? Les témoignages des proscrits qui affluent, mais surtout, les journaux belges. Il se procure non seulement les éditions publiées depuis son arrivée, mais aussi toutes celles parues depuis le 2 décembre.
La Nouvelle se Propage : Une Mosaïque d'Informations
La presse bruxelloise, avec ses temporalités et ses lignes éditoriales différentes, est une mine d'informations.
Le Premier Cri : L'Indépendance Belge

La Réponse Immédiate : La Nation et son Édition Spéciale

« Aujourd'hui M. Bonaparte a porté sa main criminelle sur la République : la Constitution ! la Liberté ! Le crime de brumaire est renouvelé. Nous sommes sous la dictature du sabre… »
La Censure et la Confusion : L'aveu du Journal de Bruxelles
L'information a du mal à passer les frontières. À Paris, la censure est déjà à l'œuvre. Le Journal de Bruxelles du 3 décembre en fait l'amer constat, avouant son désarroi face à l'absence de nouvelles de son contact sur place :
« Nous ne savons comment expliquer le silence de notre correspondant de Paris, à moins de supposer que ses dépêches ont été refusées par les agents de l'autorité supérieure… »
Ce n'est que le lendemain, le 4 décembre, que le journal se rattrape en consacrant sa une et de longues colonnes aux événements parisiens.
L'Urgence de la Dépêche : La Mort de Baudin

« Une tentative de résistance a été faite dans le faubourg Saint-Antoine. [...] On assure qu'un représentant montagnard, M. Baudin, a été tué les armes à la main. »
Une Ligne Éditoriale Révélatrice : Le Cas du Journal de la Belgique
Le traitement de l'information révèle aussi des lignes éditoriales distinctes. Le 3 décembre, Le Journal de la Belgique relègue les événements à l'intérieur de ses pages. Plus révélateur encore, il ouvre son article en donnant la parole au camp bonapartiste :
« L'article suivant du Constitutionnel mérite d'être lu à plus d'un titre ; c'est un commentaire sur la pensée politique du président… »
En choisissant de relayer en premier lieu la propagande du Constitutionnel, le journal officieux de Louis-Napoléon, il adopte de fait le point de vue du nouveau pouvoir, invitant ainsi ses lecteurs à considérer le coup d'État comme un acte justifié.
C'est donc à travers ce puzzle d'informations – dépêches, correspondances, analyses et aveux de censure – que Victor Hugo a pu reconstituer les faits. La presse belge, dans toute sa diversité, lui a fourni la matière première indispensable pour transformer l'actualité en Histoire et entamer la rédaction de son livre Napoléon le Petit.
Source des informations et des images : BelgicaPress, la bibliothèque numérique de la Bibliothèque royale de Belgique.