Lettre 5 - Alfred de Musset
L'enfant terrible du romantisme
Alfred de Musset est l'une des figures les plus éclatantes et singulières du romantisme français. Poète et dramaturge de génie, auteur de chefs-d'œuvre comme Lorenzaccio ou les poèmes des Nuits, il incarne une facette plus intime, douloureuse et passionnée du mouvement. Surnommé l' "enfant terrible du romantisme", il se distingue par son exploration des tourments de l'âme et du "mal du siècle", un art du lyrisme personnel et de l'ironie. Son personnage de dandy et sa vie marquée par les passions et les excès contrastent avec l'image plus austère de nombreux de ses contemporains.
Hugo et Musset : de l'admiration à la rivalité
La relation entre les deux hommes commence pourtant sous le signe de l'admiration. Jeune prodige, Musset fait ses débuts au sein du Cénacle, le cercle littéraire qui vénérait Victor Hugo comme un maître. Cependant, leurs chemins et leurs tempéraments ne tardent pas à diverger radicalement. À l'ambition monumentale et au romantisme social de Hugo, Musset oppose son art de l'introspection. Au patriarche travailleur et chef de file politique s'oppose l'amoureux tourmenté. En 1851, leur ancienne complicité a laissé place à une distance respectueuse mais réelle, celle de deux titans du même mouvement ayant choisi des voies presque opposées.
Une trêve inattendue au cœur de la tempête
C'est au cœur de cette tempête politique et personnelle que vit Hugo qu'une missive apporte une diversion presque irréelle. Elle est datée du 20 novembre 1851 et signée par Alfred de Musset. L'ancien rival, l'homme avec qui les relations furent si complexes, lui annonce sa candidature à l'Académie française et sollicite son soutien. La réponse de Hugo est immédiate et surprenante. Mettant de côté les querelles d'ego et les rivalités passées, il assure Musset de son vote. Dans ce moment critique, face à l'oppression politique, Hugo choisit la grandeur d'âme et la solidarité entre écrivains, montrant qu'au-dessus des combats personnels, il place l'institution littéraire et une forme de fraternité de la plume.